Poser la question « Où est Paul Biya ? » peut sembler légitime, mais elle cache souvent une intention malhonnête et manipulatrice. Certes, les journalistes et historiens peuvent s’y intéresser pour documenter des faits ou informer le public, mais les Camerounais devraient s’abstenir de s’en servir comme une excuse pour esquiver les véritables enjeux qui préoccupent leur pays. La vérité est simple : peu importe l’avenir immédiat de Paul Biya, il ne reviendra pas pour gouverner. Il incarne le passé, non l’avenir du Cameroun.
Aujourd’hui, la véritable question que devraient se poser les Camerounais est celle de l’après-Biya. En effet, il est indispensable de réfléchir sérieusement à la manière dont le pays, déjà divisé et fragilisé, pourra se reconstruire et éviter de sombrer dans le chaos. Voici les enjeux que les Camerounais, intellectuels et politiciens, doivent impérativement aborder :
1. Comment préserver la paix et la sécurité après Biya ?
(a) Unifier les factions militaires : Sous le règne de Biya, les forces armées ont été divisées et sont aujourd’hui contrôlées par différents barons du pouvoir. La question cruciale est de savoir si le Cameroun peut rassembler ces forces pour garantir la stabilité après son départ.
(b) Éviter une confrontation armée avec la population : Le Cameroun est politiquement divisé, et même le RDPC, le parti au pouvoir, n’est pas uni. La population civile et l’armée risquent de s’affronter pour le contrôle du pouvoir. Un retour à la paix nécessitera une stricte application des dispositions constitutionnelles relatives à la succession. Si une solution de compromis ne reflète pas la volonté populaire, cela pourrait conduire à un chaos incontrôlable.
(c) Former un comité de réconciliation : Les Camerounais, qu’ils soient au pays ou à l’étranger, doivent mettre de côté leurs intérêts personnels pour élaborer un plan directeur de paix et de réconciliation. Ils doivent s’inspirer des pays ayant surmonté des transitions similaires.
2. Résoudre le conflit au Cameroun méridional
Il serait naïf d’ignorer la guerre en cours au Cameroun méridional. Ce conflit est un point central à prendre en compte dans toute discussion sur la transition post-Biya. Si le nouveau régime ou le comité de transition manque de courage pour résoudre cette question, il sera impossible de garantir une transition pacifique.
Conclusion
Tout calcul politique qui négligerait ces aspects serait non seulement irresponsable mais suicidaire pour l’avenir du Cameroun. Alors que des élites se sont enrichies sous les régimes d’Ahmadou Ahidjo et Paul Biya, le pays a été dévasté au détriment de nombreuses générations. Il est temps de remettre le Cameroun sur les rails pour que les masses souffrantes et les générations futures puissent espérer un avenir meilleur.
Plutôt que de demander où se trouve Paul Biya, demandons-nous ce que nous faisons pour contribuer à la paix et à la reconstruction du Cameroun. Après Biya, ce n’est plus lui, c’est vous qui incarnerez l’avenir que vous avez réclamé.
Dr. David Makongo