Je fais partie de ceux qui estiment que le système éducatif guinéen est mal structuré, surtout dans les domaines techniques et numériques. Aujourd’hui, des milliers de jeunes s’engagent dans des filières comme le génie informatique, mais à la fin de leur parcours, ils se retrouvent sans aucune compétence pratique.
Beaucoup d’étudiants passent quatre (4) ans à l’université, qu’elle soit publique ou privée, mais ne savent même pas configurer un simple serveur, n’ont jamais manipulé de véritable équipement informatique, et ne maîtrisent pas les outils techniques de base. Et pourtant, ils obtiennent leur diplôme sans encombre.
Pourquoi cela se produit-il ?
Parce que les cours sont entièrement théoriques, les professeurs expliquent des concepts, donnent des définitions, mais ne montrent jamais comment les appliquer. Pire encore, certains enseignants n’ont jamais mis les pieds sur le terrain et ne maîtrisent pas les outils qu’ils sont censés enseigner.
Ce système produit des diplômés sans compétences, des jeunes sans emploi, et un pays qui reste à la traîne.
Ce qu’il faut changer
Je propose qu’on réorganise complètement l’enseignement supérieur, technique et professionnel en Guinée, en mettant l’accent sur des domaines d’avenir comme l’informatique, l’électronique, la domotique, l’électricité ou la maintenance.
Il est essentiel de s’inspirer de modèles qui fonctionnent ailleurs, comme Luxembourg, où il existe plusieurs niveaux de formations pratiques :
L’idée ici est de mettre en place des écoles spécialisées, comme les CIP (Certificat d’Initiation Professionnelle), pour aider les jeunes sans diplôme à découvrir un métier.
On pourrait aussi créer des établissements tels que les BIT (Brevets d’Initiation Technique) ou les IIT (Instituts des Industries et Technologies), inspirés des IUT Luxembourgoise, pour établir un lien solide entre l’éducation et le monde du travail.
Il est essentiel d’offrir une formation continue et accessible à ceux qui souhaitent reprendre leurs études ou se réorienter, avec des passerelles vers l’emploi.
Dans le domaine du génie informatique, par exemple, il est essentiel d’avoir une structure à plusieurs niveaux, à l’image de ce qui se fait au Sénégal par exemple
Une base solide en pratique (réseaux, systèmes, développement…),
Des stages obligatoires en entreprise,
Et une progression claire allant du CAP au Bac Pro, puis au BTS et enfin à la Licence Pro.
En ordonnant aux institutions publiques et solliciter des entreprises de prendre des stagiaires.
Des instituts techniques bien équipés, avec du matériel, des laboratoires, et des enseignants compétents.
Le rôle de l’État est essentiel
L’État ne peut plus rester en retrait.
Il doit :
Fournir aux universités publiques les équipements techniques, les logiciels, les laboratoires et les ateliers pratiques nécessaires.
Effectuer des contrôles réguliers dans les universités privées pour s’assurer qu’elles forment réellement les étudiants et ne se contentent pas de délivrer des diplômes ;
Mettre en place un organisme national indépendant qui évalue les étudiants à la fin de leur parcours, avec des examens pratiques obligatoires avant l’obtention du diplôme, afin de valider de véritables compétences.
Un diplôme sans compétences, c’est inutile
Aujourd’hui, de nombreux jeunes diplômés peinent à trouver leur place sur le marché du travail. Ce n’est pas parce qu’ils manquent de motivation, mais parce que le système les a laissés tomber. On leur remet un diplôme, mais sans leur enseigner des compétences concrètes.
Il est grand temps de changer cela, d’offrir une seconde chance à ceux qui souhaitent apprendre un métier, de donner un véritable avenir à nos jeunes et de sortir la Guinée du sous-développement numérique.
Le numérique ne se construit pas avec des discours, mais avec des actions concrètes. Pour cela, il faut une véritable école professionnelle, sérieuse, accessible et bien encadrée.
Tribune signée : Seydouba Camara